Klub des Loosers - Last days

L’an dernier, le Klub des Loosers opérait un retour en force avec un album saisissant, tranchant avec ses prédécesseurs mais gardant l’esprit du Klub. 8 années se sont écoulées entre “Vive la vie” (Record Makers) et “La fin de l’espèce” durant lesquelles Fuzati a pris du recul par rapport à sa carrière (suivez l’ABCDRduson pour en savoir plus) et a pris part dans différents projets tels que Le Klub des 7 réunissant la crème du rap envinassé (James Delleck, Gérard Baste, ATK) et une tape instrumental labellisée Klub des Loosers (“Spring Tales”). Pour se faire pardonner de cette longue absence, Fuzati a décidé de faire preuve de philantropie, ce qui n’est pas tout à fait son fort, et d’offrir “Last Days”, un album instrumental de bon goût.

On peut affirmer avec ferveur que le Klub des Loosers a bien réussi un truc durant sa carrière, à l’instar de toute la bande TTC/La Caution/Svinkels & co : le développement d’une scène rap français alternative s’opposant aux infâmes merdes qui ont vu le jour sur Skyrock au début des années 2000 alors que les poids lourds de l’hexagone sombrait peu à peu (Booba, NTM, IAM & consorts). Cette nouvelle scène donc a vu le jour dans les banlieues tranquilles de la capitale ou dans le Paris intra-muros et non pas dans les cités où la police ne va plus. Les lyrics ne traitent pas de la brutalité policière ou de la corruption de la justice mais plutôt du bon pinard qui tâche, des joints qui cassent le crâne ou des femmes faciles. Ces rappeurs faisaient l’apologie d’un hédonisme sans limites et se targuaient de faire des infarctus à moins de 30 ans ou de retourner les clubs. Dans le cas du Klub des Loosers, il s’agit plutôt de thèmes liés à la dépression, au mal-être ou des échecs amoureux. Fuzati est né sous le signe du V et transcrit son ennui mortel dans ses textes sombres et dépressifs.

Last days a beau être un album instrumental, Fuzati en a accouché dans la douleur et le désarroi. Il a essayé de faire de la musique son métier, sans succès et a pris un job occupant ses journées. Il a composé cet album la nuit et le week-end. Réalisant qu’il avait de moins en moins de temps à consacrer à la musique, il est tombé dans une lente dépression alcoolique et cannabinoïque tout en s’obstinant à composer un morceau par jour et abusant de différentes drogues jusqu’à souffrir de troubles cardiaques. C’est un album intime et personnel qui en a résulté. Comme d’habitude dans ce genre d’albums, les pistes sont inégales et courtes. Fuzati semble traîner sur sa MPC et tâtonner des samples variés et old school. Des productions angoissantes telles Iron Bird, Anonymous ou Recovery que se mêlent à d’autres plus joyeuses comme Working time, The Trip ou On his own way à l’image de ce qu’a pu faire Detect sur les albums du Klub. Fuzati ne dément pas ses influences jazz et hip-hop et laisse la part belle à ses racines. Il expérimente un peu avec The Lab sorti tout droit d’un univers Moroderien.

Fuzati s’en sort bien, malgré une approche hésitante et fait de cet album un bon compromis pour ceux que le flow de Fuzati insupporte. Pour ma part, j’attends de pieds ferme le successeur de “La fin de l’espèce”. Last days sort le 13 mai sur Modulor.

@CyprienBTZ