WU LYF

C’était il y a deux ans déjà. Oui le temps passe vite, surement très vite même. En 2011, WU LYF explosait à la face du monde. Une nouvelle page de la légende de Manchester, cette ville si particulière, s’écrivait sous nos yeux sans que quiconque ne sache bien quelle place le groupe allait prendre. Sans que personne ne soit capable de dire si nous avions à faire à un coup de bluff, un coup d’un soir en quelques sortes, ou alors aux débuts d’une magnifique épopée. Deux ans plus tard donc, le tableau semble plutôt facile à peindre après que le groupe lui même ait annoncé, à demi-mots ou de manière explicite, c’est selon, la fin de l’aventure, la fin de son aventure. Et pourtant.

Et pourtant l’épopée a bien eu lieu. Là, au beau milieu d’un album, Go Tell Fire To the Mountain, insaisissable. Au travers de dix morceaux d’une puissance si faible ou d’une faiblesse si puissante, à vrai dire on ne pourrait choisir, on ne voudrait choisir, WU LYF offrait une œuvre complète, totale. Un vrai album, un album vrai comme l’on en voit de moins en moins. De ceux qui ne s’écoutent que d’une seule traite, qui ne prennent tout leur sens qu’après 45 mn. Un véritable puzzle. WU LYF aura donc laissé l’image de cet animal sauvage sur le fil, de ceux qui ne se dévoilent pas assez, instable mais en constante recherche d’équilibre. Avec le recul on ne peut que les remercier d’en avoir décidé ainsi.

Ainsi, deux ans plus tard les différents membres ressortent petit à petit de l’ombre et commencent à délivrer quelques merveilles tordues, chancelantes, comme on n’en avait plus entendu depuis quelques temps.

 

Los Porcos

Los Porcos

Trois membres de l’ex collectif mancunien, le batteur Joe Manning, le bassiste Tom McClung et le guitariste Evans Kati ont décidé que non, bordel, ils n’en avaient pas fini de jouer ensemble. De la sorte, et surement pour plein d’autres raisons, Los Porcos voyaient le jour. Los Porcos, oui vous avez bien entendu. On est bien loin de l’esthétique révolutionnaire, tribal, chaotique et romantique du World United Lucifer Youth Foudation à première vue je vous l’accorde. Pour autant, force est d’admettre, de constater, d’apprécier – force est de nombreuses choses en fait – que les quelques morceaux, deux pour le moment, que le groupe nous offre sont tout bonnement excellents. « Do You Wanna Live » a tout d’un grand morceau. On y retrouve tout ce qui a pu faire le succès des groupes pop des dernières années (on pense en vrac ici à Animal Collective, Yacht ou encore Vampire Weekend) avec une touche de mélancolie, de fierté, une gouaille en plus. Avec des couilles et une âme au final, et ça fait fichtrement du bien il faut l’avouer. Par dessus tout ça, Los Porcos prend le risque de ne pas rappeler à tout va WU LYF, de laisser le cadavre à d’autres, à une personne en particulier.

 

Ellery Roberts

Ellery Roberts

Cette personne n’est d’autre qu’Ellery Roberts, frontman et voie de feu WU LYF qui, il y a de cela quelques jours, dévoilait sur son tumblr un nouveau morceau sobrement appelé « KΞR✡U’S LAMENT ». On y retrouve pleinement la touche WU LYF. Dans une chanson aux accents épiques, dramatiques et plein d’autres superlatifs en « iques », pour montrer à quel point le type y met du sien, Ellery Roberts nous offre, nous jette, nous délivre sa voix si particulière. Les arrangements, tout en restant proche de ceux d’un « Heavy Pop » par exemple, prennent un très léger accent électronique qui vient remplir l’espace sonore tout en laissant une liberté nouvelle à ce timbre de voix empli d’une force chancelante, d’une rage désabusée.

 

Francis Lung

Francis Lung

Et Francis Lung dans tout ça ? Le bassiste, l’autre bassiste. Celui qui prêtait bien souvent sa voix pour venir seconder, appuyer, pousser, répondre à Ellery. Et bien disons que j’aime garder le meilleur pour la fin. Monsieur Lung a décidé d’y aller tout seul également , de « se la jouer solo » comme les journalistes aiment dire, et de ce qu’on l’on a pu entendre, autant dire que le bougre a eu bien raison. On peut donc quelque part remercier WU LYF d’avoir pris le risque de foutre tout ça en l’air, d’avoir fait exploser la machine, tant les morceaux de Francis Lung en solo sont, chacun, de véritables petites merveilles.

Ainsi, on ne peut que vous conseiller d’aller là sur son tumblr également pour y découvrir les cinq chansons qu’il nous offre. « Cinq chansons seulement ! »  me direz vous « et en plus avec deux reprises ! ». Oui mais voilà, ces morceaux comprennent d’une part une fantastique reprise de « Sitting On The Dock Of The Bay » d’Ottis Reading, caverneuse, qui n’en rajoute pas trop, juste ce qu’il faut et pourrait être, si elle se trouvait dedans, la meilleure chanson et de loin du dernier album des Black Keys et des Black Lips réunis. Et, d’autre part « Cinema Ideals », ce qui est, de loin, le morceau folk le plus bandant de l’année, au minimum. On y trouve tout à la fois du The Coral, du Jonny Cash mais aussi et surtout beaucoup d’Elliot Smith. Une guitare, un harmonica et bordel, Francis nous emmène quelque part où on a surement jamais mis les pieds ou alors dans un coin qu’on a connu, mais abandonné depuis bien trop longtemps.

 

Alors non, on ne fera pas ici de bilan inutile sur qui fait le mieux, qui fait le moins ( ?) etc … A vrai dire, on en serait incapable, j’en serais incapable et on en n’a pas grand chose à faire. Le fait est que WU LYF a éclaté, un peu partout, là dans Los Porcos, là avec Ellery Roberts et enfin là aussi avec Francis Lung. Le fait est que ce qu’ils nous offrent depuis plusieurs semaines est bon, très bon même et que c’est avec le sourire au coin des lèvres qu’on peut aujourd’hui ressortir ce putain de Go Tell Fire to the Mountain. L’insérer, l’écouter, ne pas avoir un seul regret et dire merci, merci les gars d’avoir fait ça et merci de continuer, à votre façon.

 

Info : Los Porcos et Francis Lung joueront au Midi Festival les 27 et 28 Juillet prochain à Hyeres. Pour plus d’informations: http://midi-festival.com/ 

Charly

CharlyBct