L’année 2018 fût belle pour tous celles & ceux qui regardent avec attention, intérêt & amour le pays du Soleil Levant. Tokyo, Hiroshima, Kyoto, Kobe, le Mont Fuji, les grands paysages d’Hokkaido, la vitesse de la ville & la douceur des couleurs du printemps : le Japon, dans tout sa diversité, était l’invité d’honneur de cette année culturelle bien nommée « Japonismes ». Expositions, performances, rétrospectives, premières : tous les domaines de l’art ont eu droit de citer.

Parce que nous aussi, à des degrés diverses selon nos sensibilités personnelles, regardons de temps en temps tout à l’est, nous nous sommes dit qu’une courte semaine dédiée à une partie des scènes musicales japonaises d’hier et d’aujourd’hui serait pertinente. D’autant plus que, depuis plusieurs années, une (re)découverte de tout un pan des musiques produites si loin de chez nous est en cours. On ne compte plus les compilations, rééditions, hommages & emprunts aux géants tels que Ryuichi Sakamoto, Haruomi Hosono, Soichi Terada, ou encore Hiroshi Yoshimura. Un second souffle, voire une reconnaissance tout court pour nombre de producteurs encore en activité, trop peu reconnu hors de leurs frontières.

À notre tour, avec beaucoup d’humilité et de tendresse, de se pencher sur l’archipel. Au programme de cette semaine : une plongée dans la discographie de Soichi Terada (ci-dessous), un retour dans les nappes nippones des 80’s, et une sélection hétéroclite, subjective mais passionnée dans 40 ans de musiques japonaises. Bon voyage !

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’année 2015 restera un grand cru pour le compositeur et arrangeur japonais Soichi Terada jusqu’alors inconnu du paysage électronique (excepté au Japon). En rééditant ses meilleurs morceaux de house période 90’s, Sounds From The Far East, Rush Hour & Hunee tapent dans le mille et créent un engouement certain pour une musique qui apparaît alors nouvelle pour la génération actuelle. Tantôt rétro, résolument intemporelle, cette house qui rythme les festivals et clubs d’aujourd’hui est toujours pertinente. Retour à la source.

Soichi Terada sera présent, parmi bon nombre d’artistes de l’archipel nippon, à la Japan Connection Festival – événement dédié aux cultures & musiques électroniques du Japon, du 9 au 11 mai. Retrouvez-le en live jeudi 9 mai à la Gaîté Lyrique avec Sauce81 & Kuniyuki Takahashi.

1988, le plein boom de la house made in US. De l’autre côté de la planète, le jeune Soichi Terada fait ses premiers armes dans la production électronique. Doté d’une formation en orgue électronique et inspiré par le Paradise Garage (club alors à son firmament, à NYC), il crée un son unique, issu de ses références personnelles : il sample bruitages & voix, des sumo aux moines bouddhistes jusqu’à des références traditionnelles. Les productions qu’ils composent pour son label Far East Recording – où l’on retrouvera plus tard plusieurs de ses célèbres EP’s et LP’s – sortis entre 1992 et 1996, notamment le double LP Far East Recordings Vol.1 et Vol.2 contiennent une grande partie de ses titres les plus emblématiques. Parmi ses plus célèbres, on retrouvera « Do It Again », « Tokyo XXX » ou encore « Low Tension », devenus aujourd’hui de véritables bangers. Certains d’entre eux sont d’ailleurs réalisés avec son acolyte Shinishiro Yokota.

Fasciné par l’usage du sampling, sa discographie se révèle truffée d’échantillons en tout genre. En particulier, l’usage de tubes disco US, toujours sous influence du Paradise Garage : le fameux « Got To Be Real », reprise du morceau du même nom de Cheryl Lynn, « Saturday Love Sunday », reprit lui de Cherrelle & Alexander O’Neal, « Let Me Groove » d’Earth Wind & Fire, « CPM » empruntant à « Keep It Warm » de Voices In The Dark et les vocales de « Peanut Butter » de Gwen Guthrie et de « Do It To The Music » de Raw Silk … Plus atypique encore, ses productions drum’n’bass sur Sumo Jungle EP qui s’inspirent de combats de … sumo. On retrouve beaucoup d’empreintes vocales japonaises, ce qui donne une véritable teinte à ses productions. Le fameux morceau « Sunshower », chanté par l’artiste japonaise Nami Shimada en est un bel exemple.

On retiendra plusieurs temps importants dans la carrière du musicien comme son passage à New York en 1989 : il y dépose alors plusieurs copies de son disque « Sunshower », qui se verra ensuite remixé par Larry Levan. Son rôle dans l’habillage sonore des jeux vidéos pour Playstation et le jeu Ape Escape fin 90, alors en plein ascension sur le marché japonais, rappelle ainsi son lien étroit avec cet univers et les sonorités 8-bit liées (« Voices From Beyond »). La reconnaissance de sa musique ne se fera qu’en 2015, on l’a dit, avec la sortie de la compilation sur Rush Hour. Un point d’honneur en forme d’hommage dans le répertoire du producteur – et même de la house japonaise, qui (re)mettra au centre du jeu une musique jusqu’alors méconnu du public occidental.

 

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