Septembre est le mois choisi chaque année par les labels pour sortir les albums “Pitchfork”. Sûrement par souci de disponibilité intellectuelle des auditeurs qui, après un bel été, sont plus à même de se pencher sur les nouvelles sorties. Parmi la floppée de disques que l’on a pu écouter en septembre, se trouvaient “Key to the kuffs” de JJ Doom, le médiocre “Breakthrough” de Gaslamp Killer et le très attendu “Until The Quiet Comes” de Flying Lotus.

Flying Lotus s’est imposé comme un producteur original prenant à revers les codes du sampling et de la MPC en mélangeant des influences antinomiques pour créer un style propre. C’est donc une belle balayette que FlyLo a exécutée aux beatmakers actuels en apportant une créativité et un talent hors pair à une industrie qui en avait besoin. Doté d’une culture musicale dépassant l’entendement (ses tapes Lovers Melt en sont la preuve), il produit à foisons au point qu’il n’arrive pas à reconnaître lui-même l’un de ses nombreux remixes (cf : Blind test dans Trax magazine). Après “1983”, “Los Angeles” et “Cosmogramma”, le boss de Brainfeeder sortait en septembre “Until The Quiet Comes”, l’évènement phare et tant attendu de cette rentrée musicale 2012.

Le maestro nous fait une fois de plus plonger dans les abîmes de son univers, plongée qui ne dure jamais très longtemps, aucune track ne dépassant les 4 minutes. Et ce n’est pas plus mal. Les interruptions simultanées nous amenant d’un univers à l’autre change des albums de techno longs et monocordes que l’on entend trop souvent. Les breaks entre chaque morceau surprennent et gardent les auditeurs éveillés. Les changements d’ambiance sont radicaux et peuvent manquer de cohérence. Le passage de All the secrets à Sultan’s request est particulièrement tranchant.

“Until The Quiet Comes” nous fait visiter succinctement les profondeurs abyssales de l’esprit torturé de son créateur. FlyLo explore les courants de la black music pour en extraire l’essence mais laisse la part belle à ce hip-hop instrumental et abstrait qui lui est si cher (Putty Boy Strut). Comme à son habitude, la musique de FlyLo passe sans vergogne de l’amour (Phantasm) à la haine, de la douceur à la violence, de la sérénité (Until the colours come) à l’angoisse (Me yesterday). Ces sentiments passés en revue se mélangent, s’imbriquent et se complètent.

Il reste également fidèle aux featurings qu’il affectionne tant, sans dénaturer l’ensemble de son œuvre et en gardant la mainmise sur son œuvre, contrairement à son ami Gaslamp Killer. Flying Lotus maîtrise les opérations mais il est regrettable que les invités ne soient pas à la hauteur. La diva Erykah Badu dont on attendait énormément, se révèle être bien plus à l’aise sur de l’instrumental pure et dure (que ce soit en solo ou avec Common). Il est également toujours étrange d’entendre Thom Yorke en dehors de Radiohead ou dans un univers qui n’est pas le sien (les instrus de Four Tet par exemple).

En définitive, FlyLo ne nous ment pas et il ne trahit ni son style, ni sa technique. On ne retiendra cependant pas plus de « Until The Quiet Comes » qu’un quatrième album du Lotus. Il reste dans son champ d’action et ne prend pas le risque de décevoir. Il ne veut pas se fâcher avec son public, et son public l’en remercie.

En concert le mardi 6 Novembre à La Machine du Moulin Rouge: plus d’informations.

@CyprienBTZ