Onra s’est délesté des formules qui ont fait son succès sur ses 3 derniers albums et s’est recentré sur ce qui l’anime depuis ses débuts : le Hip-Hop et le R’n’B Golden Age. Fundamentals est le sixième volet des aventures discographiques d’un producteur qui n’a pas peur de malmener ses fans.

Onra est ce que l’on pourrait appeler un pur produit de notre siècle : bidouilleur de haut niveau, il intègre la prestigieuse Red Bull Music Academy dont il sort avec les honneurs puis se dépêche de s’affranchir de cette étiquette parfois trop collante et fait oublier cette mention dans son CV par d’implacables albums naviguant entre des genres nobles : Abstract, Hip-Hop, Downtempo et Modern Funk (voir notre portrait Onra, Worwide Diggin). Onra est rapidement devenu un producteur affirmé. Un pied en Asie, l’autre dans le 13ème district parisien, cette double culture (voire triple avec la Côte d’Ivoire où il a résidé) lui confère une aisance palpable dans le choix de ses samples et donne une nouvelle définition de la prise de risques. Après le succès de ses précédents disques – notamment Long Distance – Onra aurait pu se cantonner à sa zone de confort, soit une funk futuriste qui traverse les années sans prendre de rides.

Seulement, ses racines musicales ont repris le dessus : son prochain fait d’armes sera une déclaration d’amour au son des années 90. On peut affirmer sans risques que son projet Throw’Em Up avec Lexis (série de mixes qui ravive les R’n’B Golden Age) n’est pas inconnu dans cette équation. Onra convie donc à sa table de mixage la légende de la West Coast Daz Dillinger, le renouveau de la East (Doppelgangaz, Black Milk) et ses frères d’armes (Chuck Inglish, Olivier Day Soul) pour un disque hors du temps. Le pari était osé : renier un public dans ses 20 ans, obsédé par la trap et le rap actuel, froid, rude et minimaliste. Connaissant Onra et son goût pour la découverte, le raccourci est facile et l’on sait que le but de cet album est à la fois introspectif et philanthropique. A quoi ressemblerait sa musique s’il était né 15 ans plus tôt ? Si les précédents projets du parisien diffèrent de ce nouvel album, on perçoit une démarche qui reste la même : éduquer un public en piochant dans une scène ou une culture délaissée tout en gardant le goût du risque. Sur Fundamentals, Onra conserve un fil conducteur R’n’B qui tranche radicalement avec le genre actuel et prend racine 20 ans en arrière, avant le New Jack.

Magnifique pont entre le Hip-Hop de nos aînés et la scène Beat du moment, Fundamentals rend un bel hommage à la grande époque du R’n’B avec une démarche sincère et ouverte. Album de l’été.