Avec 8 sorties anonymes à son actif, HFP est devenu une nouvelle référence pour les amateurs de techno “classique” en quête de secrets bien gardés. A l’inverse de son parent Tabernacle Records au catalogue kaléidoscopique, Head Front Panel a choisi de se concentrer sur une techno musclée pour auditeurs avisés.

La recette semble fonctionner : huit vinyles sortis par vagues de deux depuis le début de l’année, et à chaque fois 150 exemplaires épuisés rapidement. HFP affirme sa dimension underground en ne proposant pas de version numérique et en cachant l’identité des auteurs. Cela a naturellement éveillé notre curiosité.

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Le label s’appréhende aisément avec son artwork singulier. Chaque EP est accompagné d’une carte “postale” illustrant un portrait tribal coloré. Le macaron, quant à lui, se contente d’afficher le logo  typographique du label, très minimaliste et très étudié  – il forme un serre-tête.

A la première écoute, on peut prendre peur de s’ennuyer face à cette techno hypnotique et répétitive mais très vite l’efficacité des variations plus ou moins subtiles arrive à convaincre : on en redemande. Pour preuve, ce morceau, un des plus longs du catalogue actuel, qui offre une construction particulièrement intéressante avec une première moitié techno plutôt froide et métallique et une seconde moitié plutôt acid house, très entraînante :

On vous a ouvert l’appétit ? HFP se montre assez généreux et propose la majorité de ses morceaux en écoute intégrale sur YouTube.

A quoi bon vouloir révolutionner la techno quand les basiques font toujours de l’effet ? C’est bien ce que semblent penser les boss du label. Ils usent de recettes qui ont déjà fait leurs preuves pour donner naissance à de très bons morceaux hypnotiques, industriels et acides. Encore un label coincé dans les années 1990 ? Les rappels de classiques techno ne font pas de doute sur l’origine du label. Hormis ce jeu de références bien pensé, les productions se démarquent par une foule de détails organiques. Ceux-ci révèlent une épaisseur et une richesse relativement modernes dans lesquels il est plaisant de se perdre. On retrouve ces mêmes détails d’un EP à l’autre, fournissant ainsi une identité supplémentaire à celle du simple revival. Le caractère limité de la bibliothèque de sons exploités – qui permet d’imposer ainsi la signature du label – est rattrapé par une orchestration toujours différente. Suffisamment en tout cas pour justifier l’extension du catalogue en continu.

Un bel hommage à la techno des nineties et un mixage efficace ne font pas tout. Le label a ce petit quelque chose en plus qui le démarque des sorties techno actuelles et qui confirme son origine (anglaise) via un certain humour et un côté joyeux marqué par des mélodies crispées qui s’apparentent à des chants robotiques. Comme si les tribus illustrées sur les pochettes étaient passées dans un vocoder.

On ressent même une certaine frénésie qu’on a pu perdre ces dernières années au profit d’une techno plus intellectuelle. Sans prétention, le label se veut fonctionnel. Basés sur des rythmes lourds et puissants, tous les morceaux sont taillés pour le dancefloor. Ils trouveront facilement leur place – aussi bien en warm up qu’en peak time – dans n’importe quel set techno et même house ; le côté chaleureux des morceaux mid-tempo les rendant compatibles avec un set plus groovy. Récemment on a pu entendre du HFP dans les sets de Zadig et Serge de Clone.

Bien que chaque sortie n’ait pas l’allure d’une perle rare, le label reste d’une solidité imparable et d’une qualité constante, réalisant jusqu’ici un sans fautes. Sans prétendre révolutionner le style Techno, HFP est parvenu à se construire une identité d’une cohérence rare.

Les chanceux qui seront de passage à Berlin le 28 décembre pourront apprécier le premier live du label, au Tresor.

Les EPs sont disponibles à l’achat sur le Bandcamp de Tabernacle Records et  à l’écoute sur soundcloud