Le jeudi 29 Novembre débutera l’édition 2012 du festival Reims Scène d’Europe pour une durée de deux semaines. Depuis 2009, ce festival ambitieux met à l’honneur l’ensemble des arts et des spectacles vivants tels que la danse, le théâtre, la musique ou encore le cirque dans les lieux les plus reconnus de la Ville des Sacres. Pour cette quatrième édition, c’est sous les couleurs de l’indie-pop et de l’électro que se fera l’ouverture de ces trois semaines de festivités, le jeudi 29 novembre avec la soirée Klap Klap Club.

Pour cette soirée qui aura lieu dans l’Atelier de La Comédie, l’équipe du festival a chargé Yuksek, figure phare de la scène électro-pop française et rémois d’origine que nous n’avons désormais plus besoin de présenter, de réaliser la programmation. C’est vers Alb – autre local et son compagnon de tournée – Total Warr – formation électrisante qui a fait parler d’elle cette année avec son Ep « Cobay » – et Get A Room – duo de Djs parisien au style unique évoluant entre la house et la nu disco – que son choix s’est tourné. Trois artistes de qualité qui partageront la scène à ses côtés pour une soirée qui inaugurera en beauté Reims Scène d’Europe.

Nous avons eu la chance rencontrer Yuksek pour qu’il nous parle un peu plus de cet évènement, des raisons pour lesquelles il s’est investi dans ce projet, mais aussi de lui, de ses envies, d’Elektricity… C’est en toute simplicité et humilité qu’il nous a donné rendez-vous pour nous raconter tout ça.

– Parle-nous un peu de l’évènement que tu organises dans le cadre de Reims Scène d’ Europe ?

Depuis un petit moment j’ai mon studio dans les locaux de La Comédie et ce sont des gens avec qui j’aime bien travailler que ce soit pour Elektricity ou pour d’autres projets. La salle dans laquelle va avoir lieu la soirée, l’Atelier de La Comédie, est un endroit où j’avais envie depuis longtemps de faire un évènement que j’organiserai moi-même. L’équipe de Reims Scène d’Europe m’a donc proposé de l’inclure dans la programmation du festival, et j’ai dit oui.

– Est-ce toi qui es allé vers eux ou l’inverse ?

Les deux en fait, comme ça fait un moment que l’on travaille plus ou moins ensemble. Il y a deux ans, j’avais fait avec Clément de Alb, une création au Carrousel du Louvre grâce à Ludovic Lagarde, le directeur de La Comédie. C’était donc une volonté commune de faire un truc un peu marrant et original dans le cadre de Reims Scène d’Europe qui lui, est un festival beaucoup plus classique.

 

 

– Est-ce que tu partages cette vision de mélange des arts et d’évènements multidisciplinaires ?

Complètement, après c’est un peu dur à mélanger dans le cadre d’évènement comme ce festival. C’est carrément une soirée concert et club dans laquelle on ne peut pas faire de performances de ouf. En revanche, il y aura quand même une vraie scénographie et un vrai aménagement du lieu pour le rendre convivial. L’Atelier, c’est à la fois ce que j’aime beaucoup mais qui peut refroidir le public, c’est un vrai hangar type warehouse à l’anglaise en métal et tout noir.

– Parle-nous des artistes qui seront présents ? Pourquoi ce choix : ALB, Get A Room, Total Warr ?

L’idée avant tout c’était de faire un truc avec des potes. Je n’avais pas la volonté de programmer des trucs hyper connus, d’aligner des noms pour ramener du public. Je voulais plus un concept d’évènement sympa avec des gens qui ont plaisir à passer la soirée ensemble aussi bien sur scène que dans la salle.

Alb parce que c’est mon partenaire de studio depuis longtemps, qu’il a fait la dernière tournée de Yuksek avec moi et parce qu’il repart avec une nouvelle formule live cette année pour un album qui je l’espère, sortira en 2013. Son live est super, les morceaux sont mortels et avec Raphaël de ATG à la batterie c’est très efficace. J’avais donc envie de le faire jouer à Reims dans un cadre cool.

ALB feat The Shoes – Golden Chain

Total Warr on se connaît depuis longtemps. On avait le même agent et j’aime bien ce qu’ils font.

Total Warr – xxx HATE xxx

Get A Room, ce sont plus ou moins les résidents du Wanderlust à Paris, ils jouent beaucoup au Social, on s’est un peu connu comme ça. En fait, ce sont un peu les types de Djs que j’aime bien en ce moment dans le sens où ils ont un bon mélange des styles. C’est, en faisant le grand écart, tout ce que j’aime bien dans le Djing : entre Ivan Smagghe et Trevor Jackson. C’est à la fois minimal et électronique, disco et nu disco, avec un côté un peu chic et surtout très festif. C’est ni trop intello ni totalement dégueu, et c’est un équilibre qui, je trouve, est assez difficile à trouver pour un Dj.

Get A Room! – Edit

– Reims scène d’Europe, penses-tu que c’est vérifié aujourd’hui ? Surtout au niveau musical, est-ce que tu penses que les artistes rémois ont dépassé aujourd’hui le stade d’artistes nationaux ?

Oui et non. C’est plus simple pour les gens qui font de l’électronique comme Louis (Brodinski) ou moi, et dans une autre mesure comme les Shoes, d’être connus à l’étranger et de jouer hors de la France comme on fait beaucoup de Dj sets. Les trois quarts des dates qu’on fait sont même hors Europe, c’est plus Etats-Unis, Asie, Australie,… Pour les groupes de pop pure comme les Bewitched ou Alb, c’est plus difficile de s’exporter car la concurrence est beaucoup plus rude.

– Comment penses-tu que cette « scène rémoise » va évoluer ?

Je ne sais pas, je n’ai pas vraiment de vision sur cette « scène rémoise » dont tout le monde parle. Pour moi ce sont des gens qui sont réunis à un endroit à un moment donné. Pour moi il n’y a jamais eu de « scène rémoise », c’est un truc de journalistes mais qui est nécessaire en même temps à définir. Quand tu  parles de « scène » pour moi l’exemple type c’est Manchester dans ses grandes années. C’était des mecs qui avaient un son particulier, leur propre vision des choses et qui gravitaient autour d’un type, d’un leader, d’un endroit,… A Reims ce n’est pas ça. Tu vois bien qu’entre Brodinski et les Bewitched Hands il y a un éventail total de musiques.

Pour moi ce qui se passe à Reims ça relève plus du fait que ce sont des gens qui se connaissent, qui sont plus ou moins potes, qui font de la musique, parfois ensemble, et qui ont un succès mérité. Je souhaite à tout le monde que ça continue et à moi le premier !

– Elektricity, maintenant cette soirée, est-ce que tu as d’autres projets comme cela liés à l’évènementiel ?

Oué un peu. Je suis en train, doucement sans me presser, de monter un label et de créer une espèce de famille autour de moi. Que ce soit des gens que je vais signer, à qui je vais demander des remixes ou proposer des collaborations. L’idée est de fédérer pas mal de gens et de faire des soirées autour de ça afin de présenter l’univers du label.

– En parlant d’Elektricity, comment as-tu trouvé cette 10ème édition ? Est-ce que tu t’attendais à cela pour un dixième anniversaire ?

Honnêtement j’ai été surpris mais dans le bon sens bien sûr. C’est la première fois que je me rends compte de ce qu’est le concert sur le parvis en tant que spectateur. Les autres années, soit je jouais, soit je n’étais pas là. Mais cette année, pour le concert des Bewitched c’est la première fois que je me suis posé devant la scène au coucher de soleil à regarder la cathédrale et apprécier le concert. J’ai fait beaucoup des festivals et notre cadre est un des plus beaux et c’est assez dingue !

Au-delà de ça, c’était super de faire deux concerts sur le parvis. La soirée Woodkid à La Cartonnerie a très bien marché. Les afters au Palais du Tau c’est peut-être le bémol, pas en terme de fréquentation mais pour l’ambiance. Ce n’est pas un lieu qui est fait pour ça en fait. Mis à part ça, c’était un super festival. Guilhem le programmateur, bosse hyper bien là-dessus.

 

 

– Rejouer avec Brodi qu’est-ce que ça t’a fait ?

C’était mortel. Cela faisait super longtemps qu’on ne s’était pas vu sur scène et pas trop trop vu en-dehors aussi comme on a eu tous les deux des années chargées. Je pense que du coup on va refaire un peu de studio ensemble, ça nous a relancé de jouer tous les deux.

– Le festival a une touche beaucoup plus pop qu’à ses débuts, est-ce que tu penses que c’est lié à ton évolution musicale ?

Ce n’est pas lié qu’à moi parce que ce n’est pas moi qui fais directement la prog du festival. On en parle ensemble c’est tout. Honnêtement dès les premières années il y a eu cette touche pop. Une fois on avait fait un truc où il y avait plusieurs concerts dans différents bars et on avait fait Herman Dune en accoustique. On a fait Scracth Massive quand ils étaient en formation beaucoup plus rock la toute première année au Carré. Il y a cette image, parce que c’est Elektricty, qu’il n’y a que de l’électro mais il y a toujours eu d’autres genres musicaux sur le festival. Mes goûts n’ont pas excessivement changé au final. Dans la musique, j’aime bien l’énergie, j’aime bien faire danser les gens. C’est pour ça que j’adore l’indie-pop. Et c’est ça que je trouve intéressant dans un festival et une soirée de mélanger les genres.

– Lorsque tu as commencé la musique électronique tu faisais une sorte de techno « un peu vénère », comment es-tu devenu le Yuksek d’aujourd’hui ?

Il n’y a pas de transitions entre tout ça, comme c’est toujours le cas en ce moment. C’est juste que j’aime bien faire plein de trucs en même temps. Autant je serai très content de m’enfermer deux jours en studio avec Louis (Brodinski) et de faire de la techno qui défonce comme il a l’habitude d’en faire avec des grosses montées et de la 909. Et le lendemain, de bosser sur l’album de Juveniles, sur un truc plus pop où il n’y a pas de beats. J’aime vraiment écrire de la musique et la produire. Globalement j’ai fait plein de trucs que j’assume plus ou moins, que je ne réécouterais pas et que je n’ai pas forcément envie de faire écouter. C’est vrai que maintenant, la techno bien hard ça ne m’excite plus. J’ai plus 20 ans, l’âge où je produisais ce genre de choses en réalité !

– En regardant ta discographie, on a vu que tu avais travaillé avec Fafa Monteco, une ancienne figure de la house à Paris. Aujourd’hui t’intéresses-tu toujours à la house music ?

C’est une autre époque ça encore ! C’était vraiment l’époque French Touch avec Mojo, Cassius,… Il faisait partie de Superfunk avec qui il a fait le tube de l’année 2000 qui s’appelait « Lucky Star » avec Ron Carroll. Moi j’avais deux ou trois morceaux que j’avais faits, mais ce n’était même pas encore sous le nom de Yuksek. Je les ai envoyés à trois quatre personnes que je connaissais, qui les ont envoyés  à d’autres personnes jusqu’à ce que ça tombe entre les mains de Fafa Monteco. Il a voulu faire un maxi, mais je ne connaissais rien de ce mec, ni même son label. On a quand même bossé ensemble et j’ai sorti deux maxis avec lui avant d’aller sur I’m A Cliché, le label de Cosmo Vitelli, puis de signer sur une structure en Allemagne,… Cela commence à être une longue histoire tout ça.

 

 

– Une collaboration dans un style beaucoup plus house comme ça serait-elle encore envisageable pour toi ?

La house c’est un bien grand mot, mais je suis en train de commencer un peu à faire des trucs avec Falcon. C’est vraiment un mec « old school » dans sa façon de faire. C’est un vrai pote des Daft ; il leur a d’ailleurs écrit un morceau sur leur dernier album. Je l’ai croisé pas mal cette année et on s’est dit qu’on devait faire des trucs ensemble.

Globalement aujourd’hui, j’attache beaucoup d’importance aux relations avec les gens dans le travail. Quand tu passes trois jours en studio, même si c’est quelqu’un que tu admires musicalement, il faut qu’il y ait un feeling qui passe sinon ça devient un enfer. En plus je ne suis pas quelqu’un qui arrondit spécialement les angles, si on me fait chier j’ai tendance à le dire rapidement et ça peut vite coincer. Les gens avec qui j’ai pu travailler ce sont donc toujours des personnes avec lesquelles je m’entends bien.

– Il s’est écoulé sept ans entre ton premier Ep « Friendship Salad » sorti en 2002 et ton premier album “Away From The Sea”, mais seulement deux ans entre ce dernier et “Living On The Edge Of Time”. Comment expliques-tu ce changement de rythme ? Quel a été le déclic ?

Quand tu fais de l’électro pure tu n’as pas souvent l’occasion de faire un album à part si tu as un vrai projet abouti. La plupart du temps, tu sors des Eps ou tu fais de remix. Au début, moi j’étais plus dans cette dynamique-là. Puis tout a changé avec le morceau Tonight. A partir du moment où je l’ai fait écouter, c’est allé très vite : la signature sur un label, Universal,  l’idée de faire un album,… Je trouvais l’idée cool parce qu’en tant qu’auditeur j’aime bien le principe de l’album, même si ça devient un peu obsolète ces derniers temps. Après j’étais lancé, du coup le second album est arrivé plus rapidement que le premier. Mais là je vais me laisser plus de temps avant le troisième c’est sûr.

– Un an et demi de tournée et de promo de “Living On The Edge On Time”. Qu’est-ce que tu tires personnellement et musicalement de cette période ?

Une super expérience. J’avais vraiment envie de faire une tournée live en étant trois sur scène, avec un côté beaucoup plus électrique. On a vraiment apprécié le truc d’autant plus que moi ça me remettait dans quelque chose de frais. Sans vouloir faire le blazé, ça faisait bien la sixième fois que j’allais tourner en Australie ou aux Etats-Unis ; c’est cool mais j’étais un peu habitué. Du coup revenir là avec des musiciens qui n’avaient jamais joué ou même qui n’étaient jamais allés dans ces pays, ça les rendait vraiment heureux et enthousiastes ; et moi ça m’a donné beaucoup d’énergie et de fraîcheur, ce dont je peux manquer parfois.

 

– Des projets en cours : production, albums, tournée,…

Je suis en train de produire l’album des Juveniles en ce moment. D’ailleurs à la base on était sur une autre date et le plateau, dont ils faisaient partie avec The Miracles Club, était complètement différent. En ce moment, j’axe plus le truc sur la production musicale d’autres artistes que sur ce que je fais moi. Comme je sors de la tournée du disque, j’ai juste envie de produire d’autres gens, de faire du Dj set et de prendre un peu de vacances. Il y a ce projet de label dont je te parlais toute à l’heure aussi que je lancerai sans doute pour le Printemps. Il y a aussi Peter & The Magician, le projet que je fais avec The Magician justement. On a encore un maxi qui va sortir en début d’année.

– Et de quoi tu as envie ?

Au niveau musical, si je compose de nouveaux trucs, j’aimerais bien faire l’inverse de ce que j’ai fait avec “Living On The Edge Of Time”. Quand j’ai décidé de faire ce second album, j’avais vraiment envie de faire quelque chose de plus pop, avec plus de voix et moins d’électronique, et une prod plus classique. Là j’ai envie de revenir à un truc beaucoup plus différent: presque sans « vrais » instruments, ne bosser qu’avec des machines et trouver des textures de son chelous et construire avec ça. Faire plus d’expérimentation en gros.

Sinon, j’ai envie de me poser un peu. Je parlais avec Falcon toute à l’heure. Lui il habite à Biarritz et il est dingue de surf. Quand je l’ai appelé, il sortait de l’eau et allait au studio faire de la musique. Et je me suis rendu compte qu’il fallait que je m’aère un peu de ce monde de musique qui parfois peut te bouffer la vie. Préparer un album c’est cool, mais ça te prend énormément d’énergie ce dont  je n’en ai pas envie maintenant.

– Tu écoutes quoi en ce moment ?

Je t’avoue j’ai un peu fait un break de musique ces derniers temps. J’essaye de me vider la tête, ce que je fais quand je commence à me remettre à la musique et à la prod. Mais bizarrement, je ne trouve pas que ce soit un moment très excitant musicalement, je ne trouve pas qu’il y ait eu de grands albums, notamment en indie ou en pop. Même Kindness qui était attendu, j’ai trouvé ça pas terrible même si c’est un bel album. Dans l’électro, je suis assez chaud sur tous les mecs qui viennent du nord : Lindstrøm, Todd Terje, Trentemøller, Kasper Bjørke,… Pas de morceaux dingues mais une bonne vibe autour de ces artistes, un truc classe et chic mais dansant, comme je te le disais toute à l’heure sur Get A Room.

– Un dernier mot pour donner envie à nos lecteurs d’aller à la soirée Klap Klap Club jeudi prochain ?

On va bien se marrer et on va surtout faire la fête dans un nouvel endroit, ce que j’adore ! Faut venir tôt aussi parce qu’il ne faut pas louper le live de Alb.

 

Klap Klap Club – le 29/11/2012 à L’Atelier de La Comédie à partir de 21h3O

Pour plus d’informations: Reims Scène d’Europe/ Facebook