Proche du festival Nyege-Nyege et membre du label Hakuna Kulala, Slikback est l’une des sensations les plus brutes sur la scène électronique ces dernières années. On a échangé quelques mots en ces temps de  presque-confinement.

« Je passe beaucoup de temps à bosser sur de la musique, à en écouter et à passer du temps avec mes proches. » Une réponse normale, en ces temps qui ne le sont plus tout à fait. Cela devient un marronnier presque, mais c’est on ne peut plus logique : les artistes ont beaucoup de plus de temps à se consacrer à la composition, à l’écoute, à la recherche d’inspirations. Pour Slikback, cette inspiration (et la composition, qui suit) est naturelle – une idée vient, jaillit presque. Un tour de force pour cet artiste qui pourrait résumer ce que peut être la club culture globalisée : techno, grime, gQom, trap, Nord et Sud absorbent leurs influences et se complètent avec force. 

L’inspiration peut aussi venir d’une série d’improvisations, ou d’une ballade sur Internet. « Je trouve l’inspiration en me baladant simplement sur Soundcloud. Beaucoup d’artistes partagent leurs démos, leurs idées. » Une immensité d’éléments à portée de clics, qui aide à affiner sa propre production. « À l’aide de sessions d’écoute à la maison, j’arrive toujours à trouver des approches auxquelles je n’avais jamais pensé. J’en discute avec mes amis aussi. »

« Dans les deux cas, je compose en étant guidé par ma réaction aux sons. », nous dit-il. Une approche émotionnelle, presque physique qui nous donnent quelques clés à l’écoute de son dernier EP pour le toujours très exigeant label PAN. Il y signe un split EP avec Soda Plains, DJ et producteur basé à Londres, dans leur série sobrement intitulée Split : deux artistes, deux titres pour une face chacun, le regard tourné vers le club. 

Mais comme toujours avec PAN (et Slikback), la facilité n’est pas au rendez-vous. Sur « AKI » et « UZAA », il déroule avec puissance, brutalité, hargne presque, une avalanche de beat fracassés, de saturation et de boucles qui sifflent dans les oreilles. Une production sombre, amère et noire, qui pousse loin les potards, plus loin encore que sur ces précédents EPs pour Hakuna Kulala. Une raison ? « Pas vraiment, je pense que ma musique continue d’évoluer en même temps que mes intérêts. Mon approche est le plus souvent la même, et dirigée par mes sentiments plus que par la technique. C’est pour ça que cela sonne brut, je pense. »

Des sentiments contrastés en cinquante nuances de noir : indus survitaminée, trap supersonique, techno martiale, réminiscences gQom, tout se répond et s’entrechoque. Un EP bodybuildé mais pas sans finesse, qui tournera sur nos dancefloors lorsqu’on en aura le droit.

Slikback / Soda Plains, Split
PAN