Regroupant une scène de DJs et producteurs de Vancouver jusqu’alors inconnue, Frequencies From The Edge Of The Tektonic Plate, dont la sortie remonte à 1993, a été réédité il y a quelques mois par le label Brutaz. Un sortie essentielle pour toute une scène perdue dans les limbes de l’histoire des musiques électroniques et qui trouve enfin, un peu de lumière.

C’est au tout début des 90’s que Dan Handrabur, artiste roumain, part s’installer à Vancouver : il tombe alors sur tout un groupe de DJs et producteurs qui évolue autour d’un club, le World. Un after, du fait qu’en Amérique du Nord, la plupart des clubs ferment à trois heures. La mention est importante : une nuit, ou plutôt une fin de nuit ne se vit pas de la même façon qu’en club. Ici, no peak time. La course à l’énergie, à la surexcitation et aux drops est déjà derrière les danseurs et les DJs. Le temps est plus long et semble plus malléable. On ne sert pas d’alcool en after, mais des substances sont probablement de la party. La fête, et la défonce, ne sont plus les mêmes. Plus douces, peut être. Plus longues, surtout. Mis bout à bout, tous ces éléments forment un contexte, une sorte de pré-requis pour imaginer, si l’expérience vous est inconnu, ce qu’est un after en au Canada, ou aux USA. 

Il y a des exceptions bien sur, des afters bodybuildés où toute cette vibe n’existe pas au profit d’une course aux BPMs. Mais à l’écoute de Frequencies, on retrouve instantanément cette langueur électronique, cette ambiance de nuit sans fin : c’est que cette compilation, initiée par Handrabur et sortie sur son label Outersanctum, a été crée dans le but de capturer cette ambiance. 

On retrouve sur ce disque Handrabur, donc, qui signe d’un H. Mais aussi son épouse, Erra, qui apparait sur plusieurs morceaux aux côtés de Disturbik, Steve Keddie (sous son pseudo DJ Tripswitch) et Phil Western, disparu l’année dernière, sous un autre nom, Stellar Sofa. Tout au long de la compilation, et à l’exception notable de « Injector (Opaque Mix) » et de « Which Way to Forever (Cyborg Lounge Mix) », on sent cette ambiance décrite : une rave éthérée, plus lente mais plus épaisse qu’ailleurs. Plus sombre, aussi : « Timekompress » creuse un trou si profond dans la nuit noire, que l’espoir n’est plus permis. Hantées, mystiques, effrayantes presque, les productions dessinent une sorte de style à part entière : larave-chill. 

Un pas de côté, un décalage qui s’est, par la force des choses, retrouvé aux recoins de la dance music, de son histoire même. Si bien qu’il aura fallu plus de quinze années à cette scène pour quitter l’ombre dans laquelle elle était plongé. L’ombre du club et celle de l’anonymat.

V/A, Frequencies From The Edge Of The Tektonic Place
Brutaz