Titulaire d’une émission sur la célèbre NTS, Molinaro fait son apparition en production en 2017 en signant chez Apron. On aurait néanmoins bien tort de le réduire à quelques années publiques : DJ depuis bien plus longtemps, qui conserve une part de mystère (on lit à son sujet qu’il est “the London-based enigma”), il se définit avant tout comme un technicien. Il est exact, en effet – et cela transparaît aussi bien dans son show, “Responsibly Sourced“, que dans ses deux sorties Apron EP (2017) et What the Future Was (2019) – qu’il accorde une attention extrême à la facture et l’emploi des sonorités ; c’est effectivement ce qui caractérise le style de Molinaro, avant toute unité de genre. Difficile, donc, de le résumer ; disons que la signature de l’artiste est bien plus ici une empreinte de finesse, de recherche musicale et d’orfèvrerie dans la production, qu’un seul type de musique bien catégorisable ; on comprend dès lors cohabitation de morceaux ambient (“Aeva Forest”, “Her Theme”) house (“Purity”, “The Pneuma, Gio”), techno (“Ember”, “TY”, “Molow”), breakbeat, et d’inclassables aux influences multiples, surtout celle du jazz (“Entity”, “JTL”, Sofar”). En ce sens, Molinaro est bien fidèle à l’esthétique d’Apron, qu’il est difficile de mettre en mots et de cerner, mais dont l’effet est toujours très fin et, surtout, beau.

Il nous propose un podcast néanmoins moins déconstruit que certaines émissions. Autour d’une unité harmonique plutôt house classique, le mix n’est jamais agressif, mais plutôt léger et doux sans être frivole ni trivial. Il se présente comme un jeu de dynamiques, alternant 4×4 et breaks, et comme un jeu de nuances. Après un début ambient, de bons kicks breakés (style miami bass des 90’s) viennent nous déposer naturellement en 4×4 (13e minute) soutenu par une folle ligne de basse (15e). Un passage qui roule, et nous voici amenés proprement à un peu de house chicagolaise (27e), culminant ensuite en un sommet de légèreté (31e). Après un nouveau départ, une seconde partie plus sombre et plus hétéroclite mêle à l’atmosphère principale des sonorités electro et des sons plus rudes, puis, après un excellent effet de surprise (45e), des nappes synthétiques font irruption et nous portent jusqu’au dernier morceau ambient très beau. On notera qu’on est revenu au point de départ : le podcast est encadré par ces deux tracks d’ambient, tirées précisément de What the Future Was (Aeva Forest and Her Theme). Qualité trop rare pour la musique électronique (notamment pour l’usage du nuances faibles), Molinaro n’a pas eu ici besoin d’aller fort, d’aller vite, d’aller violemment, et laisse ainsi l’oreille faire l’effort d’attention au détail et à la finesse sans la saturer.