Friendly_Bacteria

Mr Scruff a sorti tous ses albums sur Ninja Tune depuis 15 ans (sur 25 ans d’existence du label) et offre ses DJ sets marathon à chaque soirée du label. A ce titre, on pourrait le qualifier de curateur dans le sens où il participe fortement à l’identité de la maison, par sa musique et ses graphismes, et car il agit comme un vrai rouage liant toutes les esthétiques de la structure londonienne. Son nouvel album, Friendly Bacteria, vient de sortir et était attendu au tournant.

S’il n’avait pas sorti de LP depuis 2008, Andrew Carthy ne s’est pas pour autant tourné les pouces depuis 2008. Entre temps, il a largement arrosé Ninja Tune de ses EPs jazzy et chaleureux, tout en tournant plus que d’habitude (au moins 5h à chaque date). Avec des tubes tels que “Music takes me up” ou “Get a move on” à son actif, il était évident que son public attendait beaucoup de lui. Or, Friendly Bacteria ne contient pas vraiment de morceaux aussi fédérateurs que l’on verrait aisément synchronisés sur des pubs Peugeot.

Il n’en reste pas moins un disque élégant qui fait la part belle aux larges influences du producteur mancunien en gardant un fil conducteur soulful qui a fait les plus belles heures de sa musique. Pour ce retour en grandes pompes, il s’entiche d’un featuring avec la légende de la house, Robert Owens, dont il admire le travail depuis son adolescence. Il se fait une fois de plus accompagner de musiciens de talent, Denis Jones et Vanessa Freeman, qui interviennent sur plusieurs de ses prod. Et c’est bien là que Mr Scruff se démarque : en faisant appel à des externes, comme par le passé (Quantic, Alice Russel), il donne à ses machines une touche humaine et organique.  Moins de samples, plus de basses, plus de vocaux.

Si les poissons sont définitivement partis (il s’est fait connaître grâce à ses célèbres fish tunes), l’ambiance salon de thé réside elle, encore et toujours. Et c’est finalement un univers plus pop et mélancolique qui se dégage de ce 6ème opus, même si la veine hip-hop du producteur est bien présente.

Mr Scruff réussira probablement à maintenir son public en haleine avec un disque fidèle à son travail et loin d’être bâclé. Friendly Bacteria ne soulèvera pas les foules et ne révolutionnera pas le genre, mais Scruff continue à se respecter et à respecter ses fans avec sa jovialité légendaire et un disque qui maintient largement le cap de sa discographie.

Ninja Tune apparaît aujourd’hui comme le catalyseur d’une multitude d’artistes aux univers opposés mais toutefois reliés par l’homme que l’on appelle Mr Scruff, preuve en est avec cet album éclectique et onirique.