Cette compilation est « certifiée ‘c’est le futur’ pour les vingt prochaines années » : c’est ce que nous disent les notes accompagnantes Now Thing 2, compilation-événement du label Chrome. 2, car c’est une suite – précisément vingt ans après la première, Now Thing. Nommée d’après un titre de Lenky, ces ouvrages compilent ce qui se fait de mieux (et de futuriste donc) dans le dancehall jamaïcain. Un genre musical utilitaire d’abord car ayant comme vocation de remplir les kilos de subs et d’enceintes des sound-system lors de block parties ou de fêtes et qui a, comme beaucoup des musiques venant de l’île, influencé par la suite beaucoup de courants musicaux.
La culture club ne tire pas les mêmes codes et coutumes que celles des soundsystem, mais partagent les mêmes aspirations : celle de faire fonctionner une foule en rythme. Now Thing 2 creuse donc dans cette direction et en seize titres, écrase nos lombaires sous des basses ahurissantes. De l’ouverture « Saddam Rhythm » au « Are You That Somebody » de clôture, une avalanche d’innovations, de saccades et de subs se frayent un chemin jusqu’à nos tissus.
On croit tour à tour reconnaitre des gimmicks garage, des breaks très bass music ou des aspirations dance. C’est lointain et familier, une sorte de présence pas totalement définie ni claire. C’est toute la force de cette sélection, gérée par Felix Hall, Lil Toby et Richard Browne. Celle de nous faire refléter le poids d’un riddim a priori quelconque sur les musiques que l’on écoute en club ou chez soi. Sans tirer des fils imaginaires ni crier à l’oubli historique, il est clair que le dancehall – de par son côté tool, outil rythmique, a aidé à faire émerger des formes répétitives de musiques globalement diffusées aujourd’hui. Un dancehall qui a pénétré une zone que l’on n’attendait pas, celle des labels indépendants français – BFDM en tête. Judaah, Low Jack, Simo Cell pour ne citer qu’eux, jouent très régulièrement du dancehall dans leurs sets et l’incluent dans leurs productions. Un dancehall certes remanié, métallique et puissant, qui tranchent avec l’image tropicale que l’on s’en fait souvent.
C’est sous cette même bannière de l’hybridation et des expériences que Now Thing 2 évolue, logé dans une position encore floue dans la grande fresque historique des musiques clubs. Il faudrait toute une vie pour remonter cet arbre généalogique et encore méconnu. En attendant de faire toute l’histoire, les drums impatients de « Fire Cracker » et les vagues solaires de « Good Vybe » nous cajolent avec force.
