On doit commencer par une rectification : ne dites plus LISA, mais Lisa More. Un changement de patronyme pour la DJ et productrice auparavant affiliée au 1O1 Club et à Clermont-Ferrand que l’on a vu poindre sur les affiches de ses prochaines dates et apparitions à venir. More, pour plus, bien sûr. Plus de quoi ? De tout, c’est ce qu’on lui souhaite. Mais on se dirige ici vers une version augmentée de Lisa, nouvelle et différente et dans les mains, un premier album. Un disque, Cyborg Tears, qui parle aussi de transformation, de version augmentée – tout comme le cyborg en lui-même. Hyper-pop synthétique bourrée de sentiments, loin de la violence des clubs et des DJ sets qu’elle délivre habituellement, le disque déroute et nous absorbe. Un versant « émo » – terme qu’elle reprendra plusieurs fois – assumé et revendiqué, qui inscrit l’artiste dans un autre temps. Celui des sentiments donc, de l’introspection mais aussi des changements. 

Des bouleversements, Lisa More en a connu. À commencer par son nouveau terrain de jeu(x) : le béton et le soleil de Marseille. Après des débuts à Clermont-Ferrand donc et au mythique 1O1 Club, elle s’est délocalisée sur la mer Méditerranée, comme un nouveau point de départ. « J’ai rarement vu une scène aussi foisonnante et variée » nous explique-t-elle. « C’est hyper inspirant : tout le monde se débrouille vraiment bien pour faire vivre la ville et exprimer son art. » Un constat que l’on partage volontiers et que le festival emblématique de la ville et de ses scènes, Le Bon Air, capte d’édition en édition. 

En 2023, c’est naturellement vers Lisa More qu’il s’est tourné : l’artiste est l’une des trois ambassadrices, aux côtés de TTristana et Goldie B qui auront pour tâches de représenter le festival et d’y programmer des artistes qui leur tiennent à cœur. Pour Lisa More, un b2b est prévu avec A Strange Wedding, « un de mes artistes préférés au monde. Je voulais donc absolument faire ça avec lui, j’ai construit la programmation de ma scène principalement autour de lui. » 

Un changement de décor qui fait suite à un période difficile durant laquelle une partie de ce disque a été composé et enregistré. « Une période traumatisante suivie d’une dépression » nous confie-t-elle. Cyborg Tears sonne presque comme une catharsis et où créer et composer était « complètement » nécessaire pour passer à une suite. On ressent beaucoup de mélancolie, ne serait-ce que dans les titres des morceaux : « Cry For u », « I Can’t Remember The Way I Loved u », « Amore »… « C’est un peu la marque au fer rouge de cette période-là pour moi » poursuit-elle. « L’expression et le fait de faire prendre vie à ces émotions était nécessaire. » Un premier album imaginé dans un maelström d’émotions parfois difficiles à surmonter, et qui s’est fait « dans un contexte où l’album en lui-même n’était même pas envisagé. » La notion de thérapie prend alors tout son sens. Chaque titre part d’un « moment très intense qui avait besoin d’être extériorisé, exprimé ». 

Cyborg Tears tente de mettre une distance, dès son titre : des larmes robotiques, non pas mécaniques mais simili-humaines, qui n’appartiennent pas tout à fait à un cœur. Celui de sa créatrice, lui, se retrouve projeté dans des plug-ins, VST et autre logiciel de composition musicale dès que l’envie est trop forte. « J’ai besoin de m’exprimer pour me détendre ». Pas de préparation autre, de l’improvisation. « 100% freestyle sur le coup des émotions (rires) » nous avoue Lisa More. Une méthode de travail rêvée, qui ne se laisse diriger que par soi-même. « J’ouvre un VST, je teste un instrument et si cela me prend un peu aux tripes, j’écris un morceau. » Simple comme tout. Romantique, aussi : une inspiration soudaine et quelques instants après, une ligne claire, un hook, une mélodie. « J’écris d’un seul coup », poursuit la productrice. « Je passe ensuite du temps sur le mixage. » Spontanée, vive : Cyborg Tears, sous son apparat technique et robotique, cache un album sophisti-pop mélodique. Terriblement sincère aussi, « coeur à vif. » 

Lisa More, Cyborg Tears
Tsunami Recordings