On vous présente deux projets sans aucun lien apparent, si ce n’est des expérimentations électroniques qui sont ici insufflées par des productrices, connues ou inconnues. À travers cette série autour de l’ambient, on vous propose de découvrir des disques novateurs et transcendants, qui ont retenu notre attention et nous inspire au fil des saisons. 

Elori Saxl, direction les montagnes

Originaire du Minneapolis, Elori Saxl Kramer vit aujourd’hui à New York où elle partage son temps entre la production de films et la composition musicale. En 2020, elle inaugure un nouveau projet d’album solo, The Distance of Blue. L’expérience démarre dans l’atmosphère estivale des montagnes d’Adiron Dacks dans l’Ouest des États-Unis pour se fondre dans l’hiver glaciale du Wisconsin.

À l’origine inventé par l’auteure Rebecca Solnit dans A Field guide to getting Lost, le « bleu de la distance » fait référence au phénomène des montagnes lointaines que l’on aperçoit en bleu du fait de la perte de particules de lumière au fil de la distance. Telle semble être l’idée de départ de l’album d’Elori Saxl, conceptuel et abstrait. Ce que l’on pense voir d’une certaine manière n’est finalement que l’effet d’un mirage. Composé en deux temps, dans deux environnements que tout opposent, le format album se sépare en deux parties : la première partie, fruit d’un été verdoyant, aux pieds des montagnes et au milieu des lacs d’Adirondacks, espace niché entre le Canada et le nord des USA tandis que la seconde partie, s’installe dans l’ambiance polaire d’une île gelée du lac Supérieur dans l’état du Wisconsin.

Durant l’été 2020, elle démarre ses premiers enregistrements avec les éléments naturels qui l’entourent, tels que l’eau et le vent. Pour ensuite se retrouver en hiver et se voir confronter à une nouvelle configuration – l’apparition de la glace et ses craquements, – apportant ainsi une variation à ses échantillons.

À force d’écouter des compositions de synthés modulaires, Elori Saxl constate une certaine similitude avec le rythme de ses échantillons, et commence ainsi à écrire des parties imitant l’électronique afin d’obtenir un certain flou et obtenir une confusion entre les sons, brouillant les pistes entre sons naturels et artificiels.

Carmen Villain, rêveries sonores

Carmen Villain jongle entre les rôles : mannequin un jour, chanteuse pop façon Cat Stevens durant la décennie 2010 et depuis peu, la voici réincarnée en productrice d’ambient respectée. Sa musique atmosphérique, créé à base d’échantillons de field recording et d’une palette d’instruments (flute, piano, voix, respirations, cithare) se dévoile tel un tourbillon gazeux sur Sketch for Winter IX: Perlita déjà sold-out sur le label Geographic North.

Sorti sur format cassette, Sketch for Winter IX: Perlita propose sur ses 6 pistes 20 minutes d’évasion, comme autant d’instants propice à la méditation. Un lâcher-prise s’opère, certainement grâce à l’omniprésence du field recording. L’auditeur se retrouve alors dans un voyage sonore, imaginant et devinant certains sons : chants d’oiseaux, aboiements de chiens, ruisseau bouillonnant, ruissellement de la pluie, bribes de mots. Le voyage l’emmène dans une atmosphère de plénitude des sens et d’intimité porté par la voix de la compositrice norvégienne.

Progressivement, les instruments prennent place. Alors que la flûte jouée par sa collaboratrice Johanna Scheie Orellana – déjà rencontré sur ses précédents EPs – s’intensifie particulièrement sur le dernier morceau « Agua Azul » – des accords de piano soutenus se posent sous un scintillement cosmique de guitare sur le morceau « Molina ». Alors que « Light in Phases », une cithare caresse des murmures… 

Vous l’aurez compris, Sketch for Winter IX: Perlita, véritable exploration d’ambient, se présente comme une rêverie, et surtout nous démontre déjà en février une superbe sortie de l’année 2021. 

Elori Saxl, The Distance Of Blue (Western Vinyles)
Carmen Villain, Sketch for Winter IX: Perlita (Geographic North)